Au commencement, il y avait le néant. Un immense océan de Rien qui s'étendait à l'infini. En haut, rien. En bas, rien. A gauche, rien. A droite, rien. Rien que du Rien. Où que l'on n'aille, il n'y avait rien. Mais de toute façon, on ne pouvait pas y aller car on n'existait pas encore. Chaque jour c'était la même rengaine, monotone, il ne se passait rien. Aucune molécule, pas même la plus petite, ne se déplaçait ne serais-ce que d'un nanomètre. Et ceci pour la bonne raison qu'il n'y avait pas encore de molécules, celles-ci étant en soi le fondement de la matière. Et le temps constituant de la même façon une sorte de 'quelque chose' perceptible uniquement par la raison, également dépendante du matériel, on ne pouvait donc dire que le temps s'écoulait, et ne pouvait pas même parler de 'jours'. Non, au commencement l'univers ne durait qu'une seconde. Seconde qui durait elle-même une éternité. Le temps inexistant était figé, le vide était figé. On n'était pas vivant, on n'était pas morts : on n'existait pas.
Mais tout à coup arriva un drôle de petit bonhomme. Certains le nommeront Dieu, d'autres Allah, Yahvé ou encore Le-Seigneur-tout-puissant. Il était bien en chaire, avec une démarche quelque peu claudicante et des joues comme rougies par le froid : de tout son être émanait cette sympathique bonhomie que l'on retrouve souvent chez les hommes de la campagne ; il possédait cet air un peu bourru mais profondément généreux qui inspire aussitôt la confiance. Notre Père se passa la main droite dans ses cheveux gras et en bataille puis, la faisant claquer avec la gauche sur son imposante bedaine, il s'écria d'une voix tonitruante qui transcenda le vide ambiant :
- Woh ! La Marie ! Apportes moi une bière, dont !
Silence.
Fort mécontent d'être ainsi ignoré, il réitéra sa demande :
- J'ai dit, apportes moi une bière ! C'est pô compliqué, c'que je d'mande, non ?
Silence.
Les divins traits du petit bonhomme se crispèrent alors ; ses sourcils bien fournis se regroupèrent pour n'en former plus qu'un, sa mâchoire contractée provoqua un désagréable crissement et sa tempe droite se mis palpiter deux fois plus vite. Quoi? On osait lui refusait une bière à
lui, Dieu tout puissant ? La teinte violacée de sa face rondelette trahissait son ire extrême et il s'apprêtait à beugler son courroux quand il réalisa soudain le pourquoi du comment : La Marie et La Bière n'existaient pas encore !
Voilà, ça c'est ce qu'une Erezia fatiguée + word peut donner